A la
différence des Alpes, qui s’annoncent petit à petit, le Caucase est une
barrière soudaine qui apparaît après deux heures de routes dans une plaine
archi plate et plutôt humide.
Barrage d'Enguri, au début de la route vers Mestia
Impossible de faire du rafting, malheureusement
Nous
commençons alors l’ascension et passons, en une heure de route, de 0 à 1500
mètres d’altitude. La route est magnifique, bordées de canyons : là
commence la Svanétie. Ca ressemble à la Suisse, en plus vertigineux et sans
banquiers ni montres de luxe. Seule différence : des tours parsèment le
paysage. Ces tours avaient une fonction défensive. Peut-être servaient-elles
aussi à s’espionner les uns les autres ou à se réfugier en cas de vendettas
(fréquente, semble-t-il).
Le pays
des Svans est si inaccessible qu’il est resté jusqu’à récemment coupé du monde.
Les tsars et les soviets n’exerçaient sur leurs personnes qu’un pouvoir très
théorique tant ce peuple, qui parle un dialecte parfaitement unique et
incompréhensible, vivait en autarcie en haut de ses montagnes.
Cela est
si vrai que, jusqu’il y a quelques années, les touristes qui s’y aventuraient
sans guide risquaient fort de se faire enlever, séquestrer dans l’une des
fameuses tours et dûment rançonner. A tel point que l’armée géorgienne a du
intervenir et ouvrir le feu sur lesdites tours pour faire plier les dernières
mafias locales.
Depuis,
le tourisme s’épanouit et, faisant contre mauvaise fortune bon cœur, les Svans
ont abandonné leurs habitudes mafieuses et se sont convertis à l’accueil de
touristes (ce qui permet certaines arnaques, plus discrètes et non moins
juteuses !). Une petite arnaque sympathique est celle dite « du gué » : prenez une rivière au
débit moyen, bougez un peu les pierres au niveau d’un gué pour qu’elle fasse un
peu peur, mettez-vous près dudit gué avec votre cheval et apprenez ces quelques
mots en anglais « deep and could be
dangerous ». Voilà, vous pouvez faire payer 15 laris le passage du gué
aux touristes avec votre cheval !
Nous
sommes surpris par la pression touristique. Le gouvernement géorgien a mis le
paquet pour développer le tourisme à Mestia (aéroport flambant neuf,
infrastructures modernes, développement des routes goudronnées, etc.) et il
faut constater que cela fonctionne… un peu trop. Il n’y a pas moins de
trekkeurs ici que dans les alpes européennes. Heureusement, et comme souvent en
montagne, l’ambiance entre touristes est très cool et les soirées dans les
guesthouses se passent très bien.
Nous
arrivons donc à Mestia, jolie ville tout à fait moderne, point de départ de
tous les treks. Le but de la majorité des randonneurs : atteindre Ushguli,
2 100 m, la plus haute municipalité d’Europe (on vous entend d’ici penser que
certaines stations de skis européennes sont aussi à plus de 2000 m, certes,
mais elles n’existent pas depuis 1000 ans).
Ushguli
est accessible en 4 jours de marche ou 2 heures de 4x4. Nous optons pour un
entre deux : nous ferons la première étape en voiture et le reste à pied.
Nous voilà donc partis, le trek est très bien indiqué par les cartes que
fournissent l’office du tourisme (même si le GPS s’est avéré utile). Au
programme : une dizaine de kilomètres par jours, des nuits en guesthouses
avec repas chez l’habitant et des paysages sur la barrière caucasienne qui
forme la frontière russo-géorgienne, bref, le pied.
Sieste avec vue sur le mont Ouchba (4710m)
Antoine ne valide pas l'arnaque dite "du gué"
Du coup il a les pieds bleus (l'eau sort direct du glacier...)
Dorothée a surtout fait la traversée pour pouvoir faire du cheval!
L'ami des animaux
Sans
surprise, les paysages sont époustouflants : les montagnes caucasiennes
sont vertigineuses, nous voyons de nombreux glaciers « en pente » (il
n’en reste plus tant que ça dans les Alpes, la pente les rend plus sensibles au
réchauffement climatiques), des vallées magnifiques, des canyons, des falaises
… La trace humaine est discrète mais charmante : des villages de pierre,
les éternelles tours, des bottes de foin (faites à la fourche et non au
tracteur) et des vaches et leurs vachers … à cheval !
A l'ancienne, pas de tracteurs!
Arrivée vers le village d'Adishi
Adishi, où nous avons passé une nuit en guesthouse
C'est reparti le lendemain matin, toujours avec des paysages incroyables
Début de la montée vers le col Chkhunderi, avec vue sur le glacier Adishi
Vallée d'Adishi et mont Ouchba au loin
Glacier d'Adishi et Djangha (5051m)
Chemin vers la Russie
Petite pause à 2800m
Après le col Chkhunderi, vers la vallée d'Iprali
Toujours la même barrière de montage (the Wall!) séparant la Russie de la Géorgie
Vallée d'Iprali
Finalement,
nous changeons impulsivement notre itinéraire, plutôt que de faire la dernière
étape jusqu’à Ushguli, qui longe la route de 4x4, nous prenons un taxi pour
rejoindre Ushguli, ce qui est en soi une aventure tant la route est mauvaise.
Le
but : mettre à profit notre dernier
jour pour remonter le plateau qui domine Ushguli et y admirer, tout au fond, un
énorme glacier (Shkhara, du nom du sommet qui le surplombe, 5 193m, plus haut
sommet de Géorgie,) et voir la rivière en sortir… Magique !
Ushguli au petit matin (vue depuis la guesthouse)
Ushguli et vue sur le Shkhara (5200m)
Dans la vallée woOh, de Danaaa lalilala (je suis à sec sur les légendes, dsl)
Ushguli
Dans la vallée... ok j'arrête
Belle journée n'est-ce pas!
2000m de grimpette et c'est la Russie!
Il a fait toute la rando avec nous pour un petit bout de pique-nique!
Retour vers Ushguli
Dans les minivans 4x4 (Mitsubishi Delica) avec les Russes qui prennent des photos toutes les 2s...
... "Le but de la majorité des randonneurs : atteindre Ushguli, 2 100 m, la plus haute municipalité d’Europe (on vous entend d’ici penser que certaines stations de skis européennes sont aussi à plus de 2000 m, certes, mais elles n’existent pas depuis 1000 ans). " ...
Notez cependant que Saint Véran (2042m), municipalité de plein exercice des Hautes Alpes, revendique aussi être la plus haute commune d'Europe : « Lou plus haouto coumunoutas inte se mangeu lou pan de Diou ».
Cela doit dépendre de la définition des limites de l'Europe !
Le lendemain, inutile de visiter Tabriz : la fête religieuse se poursuit (Tashura devient Ashura, mais en gros, c’est pareil) et du coup tout est fermé. Nous décidons donc de reprendre la voiture pour visiter la région. Direction : le lac Ourmia. Un ancien lac salé gigantesque qui a perdu 90 % de sa surface ses trente dernières années (pourquoi ? les besoins en eau des nombreux nouveaux habitants de Tabriz). L’endroit est surprenant. Un pont gigantesque traverse une étendue au ¾ asséchée. Des bateaux sont à sec. Nous nous approchons de ce qu’il reste de lac : l’eau est gluante en raison de sa saturation en sel, elle sèche presqu’immédiatement, laissant sur la peau du sel cristallisé. Pas grand chose à par nous Très sec Quelqu'un a oublié sa pelle, en phase avancée de cristallisation Polaire En voilà un qui ne va pas aller bien loin Antoine s'amuse comme un petit fou Sur le chemin du retour, nous nous arrêtons à Kandovan,...
Après ces journées passées à vivre comme des fermiers géorgiens, nous sommes à la recherche d’un peu de confort et de modernité. Batumi nous semble être la ville idéale pour cela. Située au sud du pays, près de la frontière turque, Batumi est la nouvelle station balnéaire à la mode depuis la perte des plages d’Abkhazie. (L’Abkhazie est une région du nord de la Géorgie ayant fait sécession, avec l’aide du Kremlin, dans les années 1990). Après quelques heures de route sous des trombes d’eau, nous arrivons à Batumi, ville située sur la côte et entourée de hautes collines verdoyantes. Cette ville est une sorte de Dubaï à la géorgienne : le centre historique est joli et bien mis en valeur et côtoie d’improbables tours futuristes tout à fait réussies. La mer n’est pas extraordinaire, la plage est en galets et l’eau est polluée en raison de la proximité d’un port commercial. Les vagues sont parfois extraordinaires, voire extraordinairement dangereuses (un shore break ravageur). ...
La traversée devait durer 40 heures, elle en durera finalement 48. Le temps est au beau fixe, la mer est à peine agitée mais, dans notre bateau monstre (équivalent d’un immeuble de 10 étages), la houle est très supportable. C'est la Mer Noire! On a même croisé un autre bateau! C'est la nuit noire! Nous mettons à profit ce temps pour mettre à jour ce blog, lire, admirer la mer (Dorothée a vu des dauphins !) et, surtout, dormir comme des loirs et manger comme des ogres (car, comme le dit Winnie l’ourson : « dormir, ça creuse et manger, ça fatigue »). Cabine plutôt confort! Avec nous sur le bateau, il y a une poignée de touristes ukrainiens (dont un improbable couple ukraino-iranien) mais surtout une grosse quarantaine de chauffeurs de poids lourds ukrainiens, géorgiens, azéris, kazakhes. Cette population est tout ce qu’il y a de sympathique : bourrés H24 au ventre rebondi et à l’œil torve, couvant Dorothée d’un rega...
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RépondreSupprimer"Le but de la majorité des randonneurs : atteindre Ushguli, 2 100 m, la plus haute municipalité d’Europe (on vous entend d’ici penser que certaines stations de skis européennes sont aussi à plus de 2000 m, certes, mais elles n’existent pas depuis 1000 ans). "
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Notez cependant que Saint Véran (2042m), municipalité de plein exercice des Hautes Alpes, revendique aussi être la plus haute commune d'Europe : « Lou plus haouto coumunoutas inte se mangeu lou pan de Diou ».
Cela doit dépendre de la définition des limites de l'Europe !